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Le Trail de Côte Rouge

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Les trails des Passerelles du Monteynard, c’était mon challenge des dernières semaines. Deux courses, à une semaine d’intervalles, et une occasion de voir du paysage en sillonnant toute la région sur ses sentiers, ses cols, ses tunnels et ses chemins de fers. Samedi 14 juillet, j’ai donc pris le départ du format de la Côte Rouge, soit 24km et 1200+ ; un joli petit morceau de montées-descentes comme on aime, avec en prime, une fameuse passerelle himalayenne !

Arrivée la veille, tard dans la nuit, le réveil fut tardif et tant mieux. Avec un départ à 15h30, je préfère être légèrement décalée et ne pas subir l’attente en pleine fournaise iséroise. Le décalage a cependant pêché au moment de trouver place dans le parking prévus pour les coureurs, et l’absence de restaurant sur la route. Il est 12h36, je suis dans ma voiture à attendre une place, et je n’ai toujours pas mangé. Le stress monte, mais j’essaie de garder mon calme.

L’attente pour la navette qui permet de rejoindre le départ se fait longue, et je regarde ma montre de manière incessante.  Je suis à deux doigts de descendre en courant jusqu’au départ, quand enfin, un mini-bus arrive sur le côté. Le chauffeur crie « 3 places, 3 places » et je me précipite sans un regard pour mes congénères. Désolé les gars, je n’ai pas mangé, et moi ça me fait ressortir mon instinct de survie.

S’en suit une double mission de récupération de dossard et de désespoir pour trouver un snack qui serve encore. Après de nombreux aller-retour sur la base nautique de Treffort, je finis avec des épingles d’une dame venant de finir le 15km et une baguette et quelques tranches de fromage. Instinct de survie, je vous le dis. La pression retombe en un instant, je mange, je sieste, j’attends même. Il fait chaud, mais le ciel est couvert et de petites gouttes tombent par moment. On nous annonce l’orage d’un côté, la chaleur à crever au sommet. Qui vivra verra, c’est l’heure du départ.

Le départ du trail de la Côte Rouge

Grande rebelle de nature, je décide de passer dans la première vague au lieu de la deuxième prévue, pour partir avec Jessica et Camille, rencontrées via Instagram et reconnues sur le chemin des toilettes. On se place plutôt en arrière, pas certaines de notre préparation pour ce genre de course. Après quelques interviews au micro, l’animateur annonce le départ et fait le décompte dans la foulée ; « 5 … 4 … 3 … 2 … 1 … Partez ! ». La foule s’élance, et on démarre à petits pas au milieu de celle-ci.

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Les 5 premiers kilomètres avant la passerelle himalayenne

Les premiers kilomètres sont principalement sur bitume, légères montées, petites redescentes, le parcours est agréable. La chaleur, elle, par contre est écrasante. Je veille donc à ne pas partir trop vite, tant je sens déjà le sang me monter au visage. L’arrivée à la passerelle se fait sans encombre et plutôt rapidement. Je n’ai absolument pas vu les 5 premiers kilomètres passer (ce sont aussi les plus roulants du parcours …).

Avant même de poser mon premier pied sur la passerelle de l’Ebron, où il est interdit de courir, une inconnue au nom de Carine, prend peur et s’agrippe solidement à mon bras. Immédiatement, je la rassure, et lui assure que cette passerelle, nous allons la traverser. Pourtant, on se fait bousculer par des pressés sans vergognes, qui font crier de peur mon acolyte. C’est vrai que la passerelle bouge, que la vue y est vertigineuse, mais pour ma part, j’apprécie le spectacle ! Arrivée au bout du périple, nous échangeons un peu avec Carine, qui en profite pour me remercier chaleureusement. Elle a retrouvé le sourire, et nous repartons de plus belle … en marchant dans la très pentue côte qui se présente à nous.

Trail de la Côte Rouge - Passerelles du Monteynard

Du D+ en pagaille jusqu’au sommet

Côtes qui s’enchaînent d’ailleurs, avec une petite redescente vers le pont de Brion, autre magnifique point de vue sur le bleu turquoise du lac de Monteynard.  S’en suit une remontée sans fin, jusqu’à la table d’orientation de la Côte Rouge, ponctuée de petites descentes toujours trop courtes. Pour autant, je suis infiniment bien. Je me sens dans mon élément, je me sens moi tout simplement. Un moi dégoulinant au vu de la chaleur, mais moi tout de même. Le ravitaillement du 7ème kilomètre me permettra d’ailleurs de prendre une douche avec l’aide d’une gentille bénévole, histoire de prendre un « bon coup de fraîche » avant de continuer l’ascension.

Trail Cote Rouge - Passerelles Monteynard (7)

Les paysages se succèdent, entre sous-bois et prairie, vu sur le lac et le Sénépi, c’est un véritable cadeau pour les yeux. Je ne ressens pas la difficulté de la montée. Je monte tout simplement. Peut-être est-ce parce que je me suis détachée des chronos et de ma montre, mais le plaisir est là, bien présent.

Au sommet, autour de la table d’orientation, le paysage est sublime avec ses arrêtes rocheuses qui découpent le ciel sur l'horizon. Nombreux sont ceux à faire une micro-pause ou une petite photo. Je ne m’arrête que quelques secondes pour regarder et je repars. Je suis une certaine « Isa » et son ami, tous les deux biens plus âgés que moi, depuis quelques kilomètres. Elle est mon phare rose, celle sur qui je cale ma foulée.

Le passage à Monestier-de-Clermont

S’en suit une longue descente jusqu’au village de Monestier-de-Clermont. L’ambiance y est folle, on entend de loin les acclamations de la foule de supporters, leurs cris, leurs trompettes et les cloches qui s’agitent. Je suis remplie d’une vague de reconnaissance, et mes jambes déroulent de grandes enjambées, comme portées par tout ce vacarme. J’ai un sourire fixée aux lèvres. J’ai l’impression d’être à l’arrivée, de jouer un podium et que la foule m’encourage. Je tape dans des mains, j’entends des « c’est ça qu’on veut ». Je prends le virage à pleine vitesse, je suis folle de joie. Et puis, c’est le ravito.

Avec une chaleur pareil, aussi beau soit mon élan, je ne peux pas me permettre de le louper. Je remplis ma poche à eau, et j’enchaîne les verres comme des shots sur un bar, avant de repartir, le sourire toujours aux lèvres.

Une montée suit le passage à Monestier-de-Clermont, et je profite de l’occasion pour une conversation FaceTime rapide avec mes proches. Je suis à 15km, plus de la moitié du parcours, et je suis bien. J’attaque la montée d’un bon pas, je cours en veillant à ne pas tomber dans les descentes (une glissade dans la terre aura quand même raison de moi, mais aussi vite tombée, aussi vite relevée !). Cette course est un vrai plaisir au fil des kilomètres. Je perds la notion du temps, j’oublie ma montre, le chrono, et je prends juste du plaisir à faire ce que je fais.

La dernière montée et la dernière descente

Sorti des sous-bois, nous subissons une dernière fois la chaleur ardente du soleil dans la montée du col de Fraisse. Quelques uns râlent, moi la première, mais avec le sourire ! Puis soudain, après une dernière partie assez ardue, le paysage nous coupe le souffle. Toujours ses roches découpant l’horizon. Je trouve ça merveilleux.

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Cependant, la dernière descente nous attend, et je regarde ma montre instinctivement. Je remarque alors le temps que j’ai mis pour arriver jusque-là, et je n’en reviens pas. Il me reste seulement 4km de descente, et d’un coup l’objectif des 4h me semble atteignable. « Même peut-être 3h45 si la descente est facile ». Mais je fais taire cette petite voix, de peur de me mettre une pression trop grande et de gâcher cette fin de course. L’objectif des 4h est plus un ordre d’idée du temps que je souhaitais mettre, sans trop y croire, et surtout sans me focaliser sur le chrono. Pourtant, des ailes me poussent aux chevilles, et je me mets mon cerveau en éveil juste assez pour crier « Gauche » « Merci » et descendre à toute allure.

J’ouvre la voie à d’autres traileurs que j’entends dans mon dos. Pourtant, petit à petit, je les lâcherais et je continuerais de doubler, jusque sur le dernier kilomètre. A chaque bénévole croiser qui nous encourage, je crie de joie. Je suis dans une euphorie totale qui me poussera même à accélérer dans le dernier kilomètre sur la plage de la base nautique.

Je zieute frénétiquement ma montre, et les larmes me montent aux yeux quand je vois que je vais faire moins de 3h45 … bordel, je devrais croire en ma petite voix un peu plus souvent !

J’arrive sur le tapis bleu, seule, et je m’élance dans une dernière accélération souriante. Sourire qui cache cette envie de vomir, celle qui dit qu’on vient de tout donner.

Trail Cote Rouge - Passerelles Monteynard (5)

3h42min16sec – 488ème / 1050 - 132ème F/ 438 -  84ème SEF / 249

Je l’ai fait, j’ai pris du plaisir sur une course, j’ai réalisé un certain chrono. Depuis mon abandon forcé du Trail Sainte-Victoire, je désespérais un peu. Mais aujourd’hui, je crois à nouveau en mes capacités, à mon envie, et à mon amour incommensurable pour la course en montagne.

A mon sens, une des plus belles façons de …

(Par)courir le monde autrement !

Camille Court en Vert de Visit & Run